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Retraite yoga - Stéphanie Aulestia

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Cours yoga nidra

Les textes de l’Inde antique relatent un temps cosmique rythmé par des grands cycles. A la fin de chaque ère, ou kalpa, on dit que tout l’univers est brûlé par le feu d’un serpent géant, puis englouti dans un gigantesque déluge, transformant le cosmos en un océan sans limite.

Dans le panthéon hindouiste, trois divinités suprêmes forment ce que l’on nomme la Trimuri. Le dieu Vishnu est l’un de ces grands dieux, on dit de lui qu’il est le préservateur, garant de l’harmonie et l’unité du monde.

Entre chacun cycle cosmique, de manifestation des mondes puis de leur engloutissement, on dit que le dieu Vishnu dort sur un océan de lait, couché sur le corps enroulé d’un serpent infini, Shesha.

Serait-il possible qu’une divinité de ce rang puisse connaitre la fatigue et la léthargie comme nous, simples humains ?

Vishnu ne dort pas d’un sommeil ordinaire. Les yeux fermés, il est dans la pure conscience, dans un espace silencieux avant toute pensée. On appelle cet état « turiya », c’est-à-dire la conscience au-delà de la veille, au-delà du rêve et du sommeil.

Le dieu flotte sur les eaux primordiales, dans l’état éternel de sommeil conscient ou yoga nidra.

Le yoga nidra est le sommeil yoguique, qui tire son nom de la déesse du sommeil, Nidra. Certains textes disent qu’elle vit sur les paupières de Vishnu ; ainsi, lorsque la déesse lui ferme les yeux, le dieu « rêve » notre monde.

Dans la Bhagava-Purana, le recueil des textes et poèmes sacrés des dévots de Vishnu, l’épisode du sommeil est décrit ainsi : « Au temps où l’univers tout entier était submergé par les eaux, celui dont les yeux ne se ferment jamais s’abandonna au sommeil, couché sur un lit formé par le roi des serpents, solitaire, inactif, trouvant la joie dans sa propre béatitude. »

La transe de Vishnu est infinie, ses yeux clos symbolisent la dissolution des choses matérielles, il demeure là où tout apparait et disparait, là où tout nait et meurt, dans la conscience pure.

Nous-même, dans nos pratiques de yoga, allongés en repos complet dans la pose du cadavre « Savasana », les yeux clos, dans le retrait des sens, nous explorons une autre dimension de notre conscience.

Le serpent enroulé, sur lequel Vishnu repose, symbolise l’énergie à la source de toute manifestation, la kundalini-shakti. Cette énergie émerge du corps par le nombril de Vishnu, sous la forme d’une tige de lotus au bout de laquelle s’épanouie une fleur d’où « naît » le dieu Brahma. Dans la Trimurti, Brahma est le créateur.

La représentation de cette scène est très célèbre en Inde et n’est-ce pas une vertigineuse mise en abîme de la création elle-même ? Le créateur nait de lui-même, jaillissant du ventre d’une autre divinité, elle-même plongée dans le rêve du prochain monde à venir. Tout se passe comme si du rêve naissait spontanément la création !

L’océan primordial figure la conscience, vaste étendue des possibles, terreau fertile à la manifestation du divin et des mondes.

Le « sommeil » de Vishnu, ou plutôt son état de conscience supérieur, se fait dans l’abandon absolu du corps physique, comme s’il fallait « lâcher-prise » ou mourir à une chose pour qu’en germe une autre.

Dans la pratique de Savasana ou du Yoga Nidra, l’accès à un état de conscience modifié passe également par le relâchement total du corps.

L’intuition, la création, naissent (ou semblent naitre) spontanément, quand tout se détend, physiquement, mentalement et que nous sommes dans la présence de nous-même.

Les choses matérielles aussi bien que les actions ne sont-elles pas des songes avant de s’incarner dans la réalité ? Le rêve, l’idée, l’image mentale sont des énergies si puissantes qu’elles semblent naitre indépendamment de nous-même et prennent corps.

En explorant nos différents états de conscience, nous ouvrons le champ des possibles. Lorsque l’Ego se tait et que les pensées s’apaisent, lorsqu’il nous semble flotter sur l’étendue de notre propre conscience, dans un état de paix profonde, on peut entrevoir ce « sommeil sans fin », matrice de la création, lieu d’émergence et du jaillissement du Soi.

Publié dans Yoga Journal France, 12 janvier 2021.

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